Situé sur la commune d’Issac, entre Bergerac et Mussidan, le château de Montréal surplombe la jolie vallée de la Crempse, cette position lui permettant de contrôler une voie de passage ancienne entre Périgueux et Bergerac.
Les origines du château sont incertaines mais il est fait mention du lieu dès le XIème siècle. Il faut noter la présence à proximité immédiate d’une motte castrale dont on devine les fossés dans les bois proches du château. Les mottes castrales ont souvent été construites au IX et Xème siècles (voir l’article 10 000 ans à pied, le circuit de randonnée pour remonter le temps).
L’histoire du château et les familles propriétaires de Montréal
Les Saint-Astier
Les parties les plus anciennes des fondations dateraient du XIIème ou XIIIème siècle. On doit la construction du château à la famille Saint-Astier, puissante famille féodale de la vallée de l’Isle qui, lors de la guerre de Cent ans, en 1314, rejoindra le parti des Anglais.
En 1344, Roger Bernard, comte du Périgord s’empare du château, Philippe VI lui en donne alors la pleine propriété. Il le revend en 1347 à Jean Galard, Seigneur de Limeuil et de Miremont. Mais, en 1360, le traité de Bretigny fait passer officiellement le Périgord sous souveraineté anglaise. Après une longue procédure, le château est restitué à Golfier de Saint-Astier, Montréal reste alors un bastion anglais. Il sera le dernier château du Périgord à être repris aux Anglais. Les Consuls de Périgueux obtiennent, par représailles contre les Saint-Astier, que le château soit démoli en 1430.
Les Peyronenc
Catherine de Saint-Astier, fille et héritière de Golfier de Saint-Astier, épouse Géraud de Peyronenc. Ensemble, ils auront un fils, Michel qui héritera du château et des terres de Montréal. En 1453, celui-ci participe à la bataille de Castillon qui met fin au conflit franco-anglais. Il en ramène un reliquaire qui renfermerait une épine de la croix du Christ.
Anne de Peyronenc, unique héritière de Michel de Peyronenc, épouse vers 1500 Pierre de Pontbriand, issu d’une famille bretonne bien établie à la cour. Sous son influence, le château va perdre peu à peu son caractère défensif pour devenir une belle demeure,
François de Pontbriand, fils de Pierre et d’Anne de Peyronenc deviendra gouverneur de Bergerac puis sénéchal du Haut et du Bas Limousin. Son frère cadet, Claude participe à l’exploration du Canada, il était, le 3 octobre 1535, au côté de Jacques Cartier sur les rives du Saint-Laurent lorsque le navigateur atteignit une bourgade iroquoise appelée Hochelaga qui allait devenir la ville canadienne de Montréal. Il y aurait ainsi un lien, pas totalement prouvé, entre le château d’Issac et la ville de Montréal.
Le fils de François de Pontbriand, Hector de Pontbriand, chevalier, seigneur de Montréal, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, épouse en 1584, Catherine de Montardit. Il a un fils qui décède rapidement et deux filles. A sa mort en 1639, sa fille Françoise de Pontbriand, qui avait épousé, le 16 septembre 1611, Gaston de FOUCAULD, hérite des terres de Montréal.
Les Duchesne
En 1649, la situation financière de Montréal est désastreuse, la seigneurerie de Montréal est vendue pour 131 000 livres à François Philibert Duchesne, lieutenant général du siège de Périgueux. Cette acquisition favorisera l’ascension de la famille Duchesne. François Philibert Duchesne deviendra juge mage et maire de Périgueux. Son fils et son petit-fils reprendront ses charges et son statut de vicomte, puis comte et enfin marquis de Montréal.
En 1752, par testament, Marguerite III Duchesne, sans descendance, va le léguer à son cousin germain Bernard-Louis Faubournet de Montferrand (fils du seigneur de Saint-Orse et de Jeanne-Charlotte d’Hautefort, sœur de sa mère).
Les Faubournet de Montferrand
Les Monferrand, seigneurs de Sainte-Orse près de Hautefort, s’installent à Montréal. Cette vieille famille de noblesse militaire compte des officiers de haut rang, bien introduits en cours.
Pendant la Révolution, en 1793, le château est vendu aux enchères comme bien national. Il est acheté par Pierre Beauronne pour la somme de 70 800 livres. Malgrè un rapport préconisant sa démolition, le château ne sera pas détruit. Henri de Montferrand, à son retour d’immigration, rejoint la propriété de son épouse au Bardou, près d’Issigeac. Faute de moyens, il ne pourra pas racheter le château. La vente de la propriété du Bardou permet à son fils Alfred de racheter le château en 1836. Le château est toujours aujourd’hui la propriété de la famille de Montferrand.
Le château
Campé sur un promontoire, on y accède par une petite route sinueuse qui nous conduit jusqu’à l’entrée du château. Doté de murailles imprenables et d’une porte solide, le château semble plutôt inaccessible.
Construit au XIIème et XIIIème siècle, le château-fort qui occupait la place du château Renaissance actuel était doté d’une double enceinte, on peut encore voir des vestiges des premières fortifications construites au XIIIè siècle. Elles seront remaniées et renforcées à plusieurs reprises.
On pénétrait par un pont-levis situé du côté de la vallée, où les murailles étaient les plus hautes et les plus impressionnantes. Le visiteur pénétrait dans une cour basse et sur sa gauche, un deuxième pont-levis, encadré de deux tourelles donnait accès au château. Sa situation et son système défensif le protégea un temps des aléas de l’histoire mais, le ressentiment des Consuls de Périgueux lui sera fatal, il sera détruit en 1430.
En 1467, Michel de Peyronenc obtient de Louis XI l’autorisation de reconstruire Montréal. Lors des guerres de Religion, le château est à nouveau fortifié. On reconstruit les murailles et quatre pont-levis. La double enceinte de remparts aura connu des adaptations nécessaires aux conflits de différentes époques.
A la Renaissance, le château sera modernisé, les anciennes ouvertures sont bouchées et on ouvre de nouvelles fenêtres dans le style de la première Renaissance. Des éléments de décoration seront ajoutés aux façades.
Pour abriter la Sainte-Epine, une nouvelle chapelle est créée en 1539 à l’emplacement d’une salle d’armes située sur les remparts. Le plafond, une voute en bois, sera ornée de quatorze étoiles et des armes des Pontbriand.
Le château de Montréal ne subira ensuite que peu de transformations. Il faudra attendre le début du XXème siècle pour voir le château se moderniser et se transformer. Les remparts seront progressivement recouverts de jardins, jardins bénéficiant aujourd’hui du label Jardins remarquables.
Montréal est aujourd’hui la demeure privée de la famille périgourdine Faubournet de Montferrand, elle est meublée et habitée. Ouvert à la visite en été, on peut y découvrir les salons, avec une collection de portraits et, dans une tour, une curieuse bibliothèque circulaire.
On visite également le souterrain avec son escalier et sa belle salle voûtés du XIIe siècle. Une grotte naturelle leur fait suite.
Ouvert au public en été, le château de Montréal peut être visité en juillet et août. Le site, les jardins, le château, son souterrain et sa chapelle intéresseront sans conteste le visiteur amoureux des belles pierres.
Clichés photographiques : André Fauré (Le Nez dans l’herbe)